Elles ne veulent pas être jetées « comme des serpillères ». Depuis un mois, onze « dames pipi » manifestent tous les jours à Paris pour que le nouveau gestionnaire des toilettes des hauts lieux touristiques les reprenne.
« On est tombées du ciel, c’est comme si on n’existait plus. Je ne dors plus, j’ai trois enfants et un loyer à payer », explique la plus jeune de ces femmes, Mahliya Fiokouna, 45 ans en marge d’un rassemblement devant des sanisettes sur la Butte Montmartre. Depuis sept ans, elle nettoie les lieux d’aisance du Sacré-Cœur, de Notre-Dame ou encore de la Place de l’Étoile.
Ces salariées, pour la plupart, ont la soixantaine et plus de vingt ans d’ancienneté. Toutes ont été mises sur la touche par la société néerlandaise 2theloo (pointWC), qui a repris au 1er juillet la demi-douzaine de toilettes gérées jusqu’alors par Stem propreté, leur précédent employeur. 2theloo promet de gros travaux pour transformer ces sanisettes en « boutiques-toilettes » design, qui combinent des WC soignés et des stands de produits divers (boissons, nounours, serviettes périodiques…).
« Ils veulent faire des boutiques de luxe et disent qu’on n’a pas le profil qu’ils cherchent », résume Mahliya. La convention collective du secteur de la propreté prévoit le transfert automatique des salariés. La précédente passation de marché en 1999 s’était déroulée « sans problème », se souvient Gabrielle, 62 ans, dont 29 à passer la serpillère. Mais 2theloo « avance qu’elle va proposer un service différent et ne se sent pas tenue d’une obligation de reprise des salariés », explique un porte-parole de la ville de Paris, qui « déplore » cette situation.
La société, qui promet sur son site internet d’offrir aux usagers une « expérience unique, meilleure qu’à la maison », n’a pas donné suite aux sollicitations des médias. Les salariées ont assigné en justice leur ex-employeur et 2theloo. L’affaire sera examinée le 26 août. En attendant, « comme elles sont transférables » et « pas licenciées », « elles ne bénéficient d’aucun droit » et ne peuvent prétendre à une indemnité chômage, s’indigne le syndicat FO-propreté.
AFP