Le parquet de Luxembourg a requis, mercredi, 12 ans de réclusion contre le prévenu qui a fini par admettre sa responsabilité dans les lésions subies aux yeux par son ex-épouse. «Il ne s’agissait pas de simples gifles, mais de coups violents», a résumé la représentante du parquet dans son réquisitoire. Lors de la troisième séance du procès, il revenait au prévenu de prendre position sur les souffrances qu’il a infligées à son épouse.
« Je regrette tout ce que j’ai fait. J’espère que cela ira mieux aussi vite que possible », a affirmé, mercredi, le prévenu. Le jeune homme de 27 ans originaire de Tunisie a fini par admettre à la barre la responsabilité à l’égard de l’ensemble des faits qui lui sont reprochés.
Une déclaration qui n’a pourtant pas satisfait le président de la chambre criminelle, Prosper Klein : « Qu’il prenne position sur ce qu’on lui reproche. Est-ce que c’est vrai? Qu’il explique comment il a pu se permettre cela! »
Pour rappel, le prévenu est poursuivi pour avoir régulièrement frappé son épouse à la tête jusqu’en mai 2014. Par ces coups répétés, la victime âgée aujourd’hui de 44 ans avait subi des hématomes et pertes de connaissance jusqu’à de graves lésions aux yeux. En raison du décollement de la rétine, elle était presque devenue aveugle. Même après toute une série d’opérations à la clinique d’ophtalmologie de Homburg en Sarre, son acuité visuelle reste aujourd’hui fort réduite.
En répondant à Prosper Klein, le prévenu a rejeté la faute sur sa mère. Lorsqu’il était jeune, elle l’aurait également frappé. À la question du président de la chambre criminelle de savoir s’il était l’auteur des lésions subies aux deux yeux, le prévenu a répondu par un simple oui.
Il a fallu l’insistance du président de la chambre criminelle pour qu’il finisse par avouer qu’il avait été effrayé par son propre comportement lorsqu’il avait vu sa femme pleurer ou perdre connaissance. Mais il n’a pas pu expliquer pourquoi il n’a pas cessé de la battre. Selon l’enquête, il avait en effet porté des coups à sa femme pendant cinq ans. Le prévenu a néanmoins tenté d’expliquer au tribunal que c’est lui qui avait conduit sa femme à la clinique. « C’est possible qu’il l’ait conduite à Homburg. Mais ce n’était pas sa décision », a remarqué Prosper Klein.
Dans son rapport, l’expert psychiatre, également entendu mercredi, a souligné « la tendance dominatrice et manipulatrice » du prévenu. Toujours selon son expertise, il présente des traits de personnalité narcissique mais pas de pathologie mentale. « Il sait distinguer le bien du mal . Sa responsabilité pénale est donc entière », conclut l’expert.
«Ses coups étaient prémédités»
Le prévenu s’est excusé à la barre pour ses actes. Mais la représentante du parquet constate que « le cauchemar a duré 5 ans. Ses coups étaient donc bien prémédités.»
Dans ses dépositions, la victime a exprimé le fait que son mari souhaitait faire d’elle une femme meilleure. La représentante du parquet est revenue hier sur les déclarations que le prévenu avait faites en 2012 à la police. « Depuis qu’on se connaît, j’ai réussi à la changer. Elle ne boit plus d’alcool et ne regarde plus les personnes dans les yeux. » Pour le parquet, il n’y a aucun doute sur le lien causal entre les coups et les dommages.
Enfin, dans son réquisitoire, le parquet a mis l’accent sur les « horribles conséquences pour la victime ». Car, d’après l’ophtalmologue qui a suivi la patiente, le « retour à 100 % de sa capacité visuelle est exclu ». La victime a des difficultés à lire et devrait souffrir d’une incapacité de travail permanente. L’expert allemand entendu avait parlé d’un taux tournant autour de 35 à 40 %.
Avant que le parquet requière douze ans de réclusion et une amende contre le prévenu, son avocat à la défense, Me Eric Says, avait insisté sur la fonction éducative de la peine et demandé au tribunal un large sursis ou un sursis probatoire. Le jugement est attendu le 28 octobre.
Fabienne Armborst