Dans l’affaire du braquage de G4S, la Cour de cassation a rejeté, jeudi, les pourvois en cassation des trois hommes ayant écopé de 22 ans de réclusion ferme. Au moins deux d’entre eux envisagent désormais de saisir la Cour européenne des droits de l’homme à Strasbourg (CEDH).
Dans la nuit du 2 au 3 avril 2013, vers 3h40, une bande lourdement armée attaquait le centre-fort du site de la société G4S, situé dans la rue du Père-Raphaël à Gasperich. L’attaque avait été très violente. En première comme en deuxième instance, trois des quatre prévenus de cette affaire avaient écopé de 22 ans de réclusion ferme. Le quatrième prévenu, Simon S., avait été acquitté les deux fois.
Dans son arrêt rendu le 28 février 2017, la Cour d’appel a en effet déclaré «non fondé» l’appel d’Anouar B. (36 ans), Cihan G. (32 ans) et Dogan S. (45 ans). À l’instar de la juridiction de première instance, la Cour d’appel a retenu que «les preuves du dossier pénal, constituées par le concours de la présence des empreintes génétiques des trois prévenus sur des objets utilisés lors du braquage et corroborées par d’autres preuves, dont celles relatives aux relations des trois prévenus avec le milieu du grand banditisme, étaient suffisantes pour retenir la culpabilité des trois prévenus».
Au total, les demandeurs en cassation avaient présenté 19 moyens pour attaquer cet arrêt rendu par la Cour d’appel. La défense de Cihan G. estimait notamment que le principe de la présomption d’innocence a été violé. «La culpabilité de Cihan G. a été principalement retenue pour trois motifs : ses traces ADN sur un bouchon de bidon d’essence, ses antécédents judiciaires et son alibi jugé non crédible», avait plaidé Me Alain Delfosse après que le conseiller-rapporteur eut présenté rapidement l’ensemble des moyens.
«L’ADN est une preuve fragile»
«L’ADN est une preuve fragile, avait argué l’avocat du barreau de Bruxelles. Et les antécédents judiciaires d’un prévenu ne peuvent constituer une présomption de culpabilité.» Il s’était ensuite attaqué au raisonnement de la Cour d’appel sur son alibi : «Cihan G. a déclaré s’être trouvé dans un café en Belgique le soir des faits. Si la Cour d’appel a constaté que cet alibi n’était pas crédible, il n’en résulte pas pour autant qu’il se trouvait sur les lieux du braquage à Gasperich.» Il a aussi soulevé qu’en maths trois fois zéro ne fait pas un. «Trois incertitudes ne conduisent pas à une certitude», avait-il conclu.
L’avocat d’Anouar B., dont l’ADN a été retrouvé sur la batterie de 12 volts saisie sur le site de G4S à Gasperich, s’était concentré sur la problématique de la couleur de la peau des braqueurs. Les policiers ont constaté lors de l’analyse des images de la vidéosurveillance que tous les auteurs avaient la peau claire. «Leur conclusion était claire. Anouar B. ne peut donc correspondre à cette description», avait considéré Me Frédéric Mioli.
Après le tribunal d’arrondissement et la Cour d’appel, la Cour de cassation était la troisième juridiction qui se penchait sur cette affaire. Pour rappel, la Cour de cassation ne rejuge pas l’affaire, mais vérifie seulement la correcte application du droit et le respect des règles de procédure par les juges du fond.
Ils envisagent de saisir la CEDH
Jeudi matin, la Cour de cassation a donc rendu sa décision. Elle a rejeté les pourvois des trois hommes. Leurs condamnations n’ont donc pas été annulées. À la sortie de la salle d’audience, Me Philippe Penning, qui défend Cihan G., a fait savoir leur intention de saisir la Cour européenne des droits de l’homme (CEDH) à Strasbourg pour violation de la présomption d’innocence.
«Dans un dossier où il y avait des éléments à la fois sur le fond et sur la procédure, nous aurions pu attendre une décision qui aille plus dans le sens des droits de la défense», a réagi Me Sébastien Lanoue, l’avocat de Dogan S. «Nous avions discuté de la procédure à Strasbourg avant même de commencer le pourvoi en cassation», a-t-il ajouté. À noter que Dogan S. et Anouar B. se trouvent en détention préventive depuis leur arrestation. Cihan G. avait pu bénéficier d’une liberté provisoire assortie d’un contrôle judiciaire.
Fabienne Armborst