«Terrorisé» par les enfants venant sonner à sa porte, un habitant de Grevenmacher avait fini par passer à l’acte, l’été dernier. Jugé mercredi après-midi, le quinquagénaire dit avoir pété les plombs…
Que par beau temps les enfants grimpent sur leurs vélos pour jouer et fassent des allers et retours en passant par la rue des Tisserands semble bien connu par les habitants de ce quartier de Grevenmacher. «Des fois, les enfants peuvent taper sur les nerfs quand ils viennent sonner aux portes. Mais ce sont des enfants. À leur âge, on faisait certainement pareil.» Tout le monde ne semble pas avoir gardé le sourire face à ces gamineries, contrairement à cette voisine appelée à témoigner mercredi après-midi.
L’incident sur lequel se penche la 12e chambre correctionnelle remonte au 17 juin 2017. Ce samedi en fin d’après-midi, un quinquagénaire exaspéré a pris un garçon de 11 ans qui était à vélo par le cou, avant de le secouer… l’enfant a fini avec un trou dans la tête.
Cet habitant du quartier sans enfant dit avoir été «terrorisé» pendant des années. Impossible selon lui de rester tranquillement chez lui et ne pas se faire déranger en lisant son journal : les enfants seraient régulièrement venus sonner et frapper à sa porte. «Combien de fois je suis sorti pour leur parler gentiment. Crier n’a servi à rien non plus, s’est défendu le prévenu de 52 ans, à la barre.
Le quinquagénaire, vigneron de métier, dit ne pas avoir lâché prise. Au moins sept fois, il se serait manifesté à la police. Il aurait également envoyé une lettre de trois pages au bourgmestre expliquant qu’il ne supportait plus la situation. La commune lui aurait alors assuré que des agents municipaux interviendraient. Mais jamais rien ne se serait passé.
«Cet après-midi du 17 juin, j’ai pété les plombs. J’ai pris le garçon par le cou et l’ai secoué un peu. Ce n’était pas plus que cela. Malheureusement il est tombé et s’est blessé…»
Plusieurs témoins avaient accouru en entendant les cris. «De loin j’ai vu une silhouette saisir l’enfant. Je me suis dirigé dans leur direction. Et puis j’ai vu qu’il le prenait une seconde fois, se remémore un homme. Quand je suis arrivé, l’enfant n’était pas bien. Il saignait à la tête.»
20 mois de prison et une amende requis
C’est le propriétaire du kébab du coin, également alerté par les cris, qui avait appelé la police. «Le garçon essayait de se relever, mais il n’y arrivait pas», précise-t-il.
Outre le trou dans la tête, la victime était couverte de multiples blessures et souffrait d’un sérieux traumatisme psychologique. Pendant deux jours, l’enfant n’avait pas pu se rendre à l’école.
«Dans un État de droit, il y a d’autres moyens que de terminer avec un trou dans la tête à l’hôpital», a lancé le président pour tenter de raisonner le prévenu. Sa réponse : «Je ne connaissais pas son âge.» Le ton est monté d’un cran. «Qu’il ait eu 10, 11 ou 12 ans, cela n’a pas d’importance», s’est emporté le juge en lui mettant les photos des blessures sous le nez. «On vous a déjà dit que vous risquiez entre trois et cinq ans de prison ? Ce n’est pas une peccadille !»
«Une peine de prison n’est pas appropriée, car il n’avait pas l’intention de lui faire mal», a plaidé Me Brian Hellinckx. D’après l’avocat de la défense, la provocation devrait lui être accordée comme circonstance atténuante : «Pendant quatre ans, ces violences morales ont perduré. Pendant tout ce temps, il a été terrorisé.»
Du côté du parquet, un autre son de cloche se fait entendre : «Il se justifie par le fait d’avoir été terrorisé par les enfants. Ce n’est pas une justification pour ce qu’il a fait!» Et d’insister : «Il dit avoir pété les plombs. Ne devrait-il pas aller chez le psychologue pour juguler sa nervosité ?»
Le parquet a fini par requérir une amende ainsi que 20 mois de prison contre le prévenu. Prononcé le 21 juin.
Fabienne Armborst