Au quatrième jour du procès du fratricide d’Esch, les deux prévenus ont dû s’expliquer. Eric L. prétend avoir perdu le contrôle alors qu’il voulait se suicider.
Comment est-ce que je peux lui fournir un alibi, si je ne sais pas qu’il a commis quelque chose de mal?» Comme mardi, le prévenu Alessandro S. (35 ans) a campé jeudi sur sa position : il n’était pas au courant qu’Eric L. avait tué son frère dans la nuit du 19 au 20 décembre 2014 dans son appartement à Esch-sur-Alzette, place Stalingrad. «Pourquoi donc avoir menti?», insiste la présidente de la 13e chambre criminelle. Dans un premier temps, Alessandro S. avait en effet fourni un alibi à Eric L. Il avait déclaré que le soir des faits, il se trouvait chez lui sur le canapé. «Je n’ai rien à voir avec le crime.»
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Durant plus d’une heure, Alessandro a été sous le feu des questions du tribunal. Son audition hier après-midi aura toutefois apporté un nouvel élément. Alessandro S. a fini par lâcher que la mère de la victime lui a offert gracieusement 180 000 euros pour l’achat de son propre appartement qui coûtait 187 000 euros. «Vous vous trouvez devant la chambre criminelle pour avoir hébergé celui qui a empoisonné et brûlé à vif son frère. Cela ne vous pose pas problème d’accepter cet argent de la mère de la victime», l’interroge la présidente. Sa réponse : «Je sais que je n’ai pas recelé.»
À la différence d’Alessandro S., Eric L. (27 ans) reconnaît les faits qu’on lui reproche. «J’ai fait une grosse saloperie que je regrette.» Mais le principal prévenu conteste toute préméditation. «Jamais je n’ai planifié de tuer mon frère.» Il explique avoir voulu se suicider : «Je voulais lui dire adieu.» Or, le soir de sa visite, une phrase par rapport à la mort de son père serait tombée et l’aurait anéanti : «J’ai perdu le contrôle.»
Il conteste avoir voulu prendre la fuite
C’est alors qu’il aurait donné à boire le jus de mangue empoisonné à son frère. Ce dernier aurait commencé à vaciller. Il l’aurait aidé à s’allonger et mis en position latérale de sécurité. La présidente le coupe : «Pourquoi avez-vous fait cela? Vous venez de dire que vous avez perdu le contrôle.»
Un long silence s’installe avant que le prévenu poursuive son récit : « »Il faut qu’il parte. » C’est la phrase qui m’est passée par la tête. C’est ce qui m’a empêché d’appeler le 112.» Il raconte ensuite avoir mis le feu à l’appartement par panique.
Eric L. a été arrêté le 11 janvier 2015 à la frontière allemande. Selon l’enquête, il prévoyait de partir en République dominicaine. «Vous parlez de fuite. Mais où est-ce que je pouvais bien me rendre avec deux packs d’eau?», tente de convaincre le prévenu. Il explique avoir voulu demander un simple renseignement à l’aéroport. «Si j’avais voulu prendre la fuite, j’aurais déjà pu partir la veille.» La présidente le reprend : «Mais vous vouliez encaisser l’héritage…»
Le procès a continué ce vendredi matin.
F. A.