Le parquet reproche au trentenaire d’avoir frappé et secoué son fils âgé de cinq semaines fin avril 2014. Les faits avaient eu lieu à leur domicile, à Kayl.
«Je l’ai secoué, oui. Mais c’était par panique.» À la barre de la chambre criminelle, le prévenu de 39 ans a plusieurs fois contesté avoir voulu faire du mal à son fils le 27 avril 2014. Il a parlé d’un acte maladroit. Or pour le parquet, il n’y a pas de doute : «Parce que monsieur était agacé par les pleurs, il a pris la décision de punir son fils.»
Les faits reprochés au prévenu remontent au 27 avril 2014. Ce dimanche après-midi, il s’était proposé de changer la couche de son fils de cinq semaines en pleurs. La mère, qui se reposait alors sur le canapé, n’était toutefois pas restée longtemps dans le salon. Après un silence total, son fils s’était remis à pleurer de plus belle. Elle avait accouru dans la chambre et découvert son fils qui saignait de la bouche. Son compagnon lui avait assuré n’avoir rien fait.
Le nourrisson, victime du syndrome du bébé secoué, était resté hospitalisé à la Kannerklinik pendant près d’un mois, dont une semaine en soins intensifs. Il était non seulement couvert d’hématomes, mais souffrait également d’une hémorragie intracrânienne et d’anomalies neurologiques.
À la barre de la 13e chambre criminelle, le prévenu a indiqué ne pas avoir frappé son fils. Il l’aurait secoué par panique. Mais en aucun cas il n’aurait voulu lui faire mal. «Mon mandant a agi par maladresse. Au lieu d’appeler la maman, il a voulu agir sans la moindre réflexion dans l’unique but de faire taire ses pleurs.» Dans sa plaidoirie jeudi après-midi, Me Katia Aïdara a mis l’accent sur l’inexpérience de son client. «La description des lésions du bébé démontre que monsieur a eu des gestes brutaux. Par sa forte corpulence, on peut admettre qu’il n’a pas mesuré sa force», a poursuivi l’avocate du prévenu avant de plaider l’acquittement. «Selon moi, il n’est pas établi que mon client avait l’intention de faire mal à son fils.»
Or du côté du parquet, c’est un autre son de cloche. «À mon avis, ce n’est pas une question d’inexpérience, mais une question de bon sens», a martelé la représentante du parquet Michèle Feider qui estime qu’il y a bien lieu de retenir les coups et blessures volontaires avec la circonstance aggravante que le prévenu est le père de l’enfant.
«Il connaissait le point faible d’un nourrisson»
Pour le parquet, il est évident que le trentenaire avait connaissance du fait que les gestes de secouement pouvaient blesser son fils : «Dans ses dépositions, il a toujours dit avoir mis la main derrière la nuque du nourrisson. Donc pour moi, il connaissait exactement le point faible d’un nourrisson de cinq semaines.»
Au fil de son réquisitoire, le premier substitut a également rappelé que le nourrisson présentait non seulement les symptômes du syndrome du bébé secoué, mais qu’il était couvert d’hématomes et ecchymoses. Le médecin légiste avait ainsi écrit que l’hématome au mollet gauche évoquait l’empreinte d’une main d’adulte. «Au vu de tous ces éléments, on peut non seulement parler d’un mauvais maniement, mais le nourrisson a aussi été victime de maltraitance», conclut le premier substitut.
Le parquet n’est pas non plus d’accord avec le fait que le prévenu est en aveux complets : «Il dit avoir fait des gestes malencontreux, mais pour le reste, il minimise les faits.» Bref, pour le ministère public, il n’y a pas de doute : «Parce que monsieur était agacé par les pleurs de son fils, il a pris la décision de le punir.» Il a fini par requérir six ans de réclusion contre le trentenaire, qui a déjà été condamné à cinq reprises pour coups et blessures volontaires sur des adultes.
En tout début d’audience, la mère de l’enfant s’était constituée partie civile. Pour son propre préjudice moral et matériel, elle réclame 25 000 euros. Pour son fils, elle réclame également 25 000 euros de dommages et intérêts. Pour rappel, depuis les faits, le couple est séparé. La mère avait récupéré son fils à la sortie de l’hôpital sous la condition d’éviter tout contact avec le père.
Prononcé le 28 juin.
Fabienne Armborst