Depuis mercredi, la 16 e chambre correctionnelle du tribunal d’arrondissement se penche sur la mort d’un homme de 84 ans survenue à la suite d’un tragique accident dans une maison de soins à Schifflange le 9 décembre 2011. En pleine nuit, un octogénaire avait quitté sa chambre et avait chuté à l’extérieur. Il était décédé quelques semaines plus tard.
Sur le banc des prévenus se trouvent deux aides-soignantes et une infirmière âgées aujourd’hui entre 41 et 51 ans. Le soir des faits, elles étaient de garde pour les 101 résidents de l’établissement. Le parquet leur reproche d’avoir causé un homicide involontaire, notamment en n’ayant pas surveillé de façon efficace la victime, compte tenu de son état de santé, pour empêcher qu’elle ne sorte de la maison de soins sans contrôle.
L’octogénaire atteint de Parkinson avait été retrouvé à 5 h 45 sur un chemin à l’extérieur de la maison de soins sous la pluie. Cette nuit-là, il faisait autour de 0 °C. Comme il se plaignait de douleurs au niveau de la hanche, l’infirmière avait appelé le 112. C’était à 5 h 57. L’octogénaire avait été transporté avec l’ambulance au CHEM avec une suspicion de fracture du col du fémur. Le patient avait été opéré. Mais il ne s’était plus réveillé après l’anesthésie. Il était décédé trois semaines plus tard.
D’après le policier chargé de présenter le rapport d’enquête hier matin, deux plaintes ont été déposées, une en décembre 2011, une autre en février 2012. En mars 2012, une première perquisition est organisée à la maison de soins à Schifflange. L’enquête établit que quand les portes de sécurité menant vers l’extérieur de l’établissement sont ouvertes, une lumière s’allume à un tableau d’affichage à la réception.
Cette dernière n’est toutefois pas occupée la nuit. L’analyse des données permet d’établir que l’octogénaire a quitté le bloc C dans lequel se trouvait sa chambre à 5 h 01. Entre 5 h 03 et 5 h 09, il actionne neuf fois la sonnette à l’extérieur du bloc B. Message qui a dû s’afficher une fois sur l’écran des pagers du personnel soignant.
« Toute une série de chambres ont été contrôlées au niveau du bloc B. Car c’est là qu’avait été activée la sonnette. Mais pas le bloc C », a résumé policier. Or à un moment, le personnel constate que l’octogénaire ne se trouve plus dans sa chambre. Les cris perçus un peu plus tôt sont mis en relation avec sa disparition. Il est finalement 5 h 45 quand le personnel trouve l’octogénaire au sol.
Des recherches partout, sauf à l’extérieur
« On a beaucoup cherché, mais personne n’a eu le réflexe de chercher à l’extérieur. Y a-t-il une explication à cela? », a demandé la présidente à l’agent. « Les sonnettes à l’extérieur ont été montées en 2000. Des dépositions, il ressort toutefois que les membres du personnel n’étaient pas tous au courant de l’existence de sonnettes à l’extérieur de la maison de soins », a répondu l’agent.
Une déclaration qu’un témoin de la défense est venu confirmer à la barre, hier. Cette infirmière de nuit, qui travaille depuis 17 ans dans la maison de soins, affirme avoir découvert un peu par hasard la sonnette en allant fumer à l’extérieur quelques semaines avant l’incident. « Entretemps le système a changé. Il y a un nouveau boîtier où c’est inscrit sonnette », a-t-elle précisé. Toujours d’après ce témoin, à l’époque, les dysfonctionnements étaient réguliers au niveau des messages affichés sur leurs pagers.
Depuis l’incident, certains patients sont logés dans des ailes fermées. La porte menant vers l’extérieur est sécurisée avec un code. Et des bracelets individualisés complètent le tout.
Le procès se poursuit ce jeudi après-midi avec l’audition du médecin légiste. Me Entringer, partie civile représentant les deux enfants et deux petits-enfants de la victime, réclame aujourd’hui 215 000 euros de dommages et intérêts aux trois prévenues pour leur faute et négligence.
Fabienne Armborst