Zero Impunity, projet franco-luxembourgeois – coproduit par a_BAHN, Camera Talk, Melusine et Webspider – est un projet transmédias d’investigation (et militant) contre l’impunité des violences sexuelles en conflits armés. Récompensé en janvier dernier au festival international du Film à Biarritz, le projet prend de l’ampleur. Découverte.
Décrypter les jeux de pouvoir, de rapports de force et les défaillances judiciaires au sein des États et des institutions, obtenir les témoignages de victimes de violences sexuelles en conflits armés, c’est là tout le travail effectué par les journalistes indépendants du Collectivo Youpress pour le projet Zero Impunity. Onze femmes ont ainsi mené six enquêtes, publiées en ligne et diffusées par douze partenaires internationaux – dont le français Mediapart.
La première enquête revient sur les viols commis par l’armée française lors de l’opération Sangaris en Centafrique, la seconde sur ceux utilisés comme moyen de torture à Guantanamo par l’armée américaine et la troisième dénonce les viols d’enfants commis par le régime de Bachar al-Assad en Syrie. Suivent les trois autres, aux contenus tout aussi diversifiés – l’inaction de l’ONU face à ces crimes, les violences sexuelles commises pendant la guerre en Ukraine et les dysfonctionnements de la Cour pénale internationale face à cette problématique.
Ces investigations constituent la base de travail qui a servi à mettre en place les diverses actions visant à lutter contre ces impunités, mais également à la réalisation d’un film d’animation de 90 minutes dont la sortie est prévue pour fin 2017, voire début 2018. À ce travail s’ajoutent quatre pétitions en ligne, disponibles sur change.org, auxquelles s’est greffée le 19 juin dernier (en l’occurrence date de la Journée mondiale de la lutte contre les violences sexuelles) une marche interactive en 3D…
L’immobilisme des politiciens
«Il s’agit du prolongement, par les réseaux sociaux, des pétitions signées en ligne. C’est une manifestation virtuelle qui regroupe les signataires sur une plate-forme commune, avec des avatars pour chaque signataire, dans un même espace. C’est un outil de communication, mais aussi de pression», clament les trois porteurs de ce fourmillant projet, Nicolas Blies, Stéphane Hueber-Blies et Marion Guth (a_BAHN production).
En plus de cette marche interactive, des actions concrètes ont déjà été menées sur le terrain. «Sur les réseaux sociaux, nous avons lancé une campagne de sensibilisation sur #zeroimpunity. Mais on ne s’est pas arrêtés là! En France, des courriers envoyés à l’ancien président de la République, François Hollande, ont obtenu des réponses décevantes. On nous a dit de laisser faire la justice…
Pire, le ministère des Droits des femmes nous a répondu que cela ne relevait pas de ses fonctions, alors que l’on parle bien là de viols sur des femmes par des soldats! Incroyable… Nous avons écrit au nouveau président, Emmanuel Macron. Comme nous n’avons pas eu de réponse, nous sommes passés à la vitesse supérieure…», expliquent-ils.
Ainsi, le 17 juin dernier, ils ont «hacké» – comprendre s’emparer – le mur du ministère de la Défense en diffusant un message au gouvernement. Sur les murs du bâtiment étatique, un appel à agir. Le but était de déclencher des réactions. Mais pour l’heure, c’est l’indifférence totale.
Nicolas Blies et Stéphane Hueber-Blies sont déterminés : «Nous n’arrêterons pas notre combat tant que les institutions n’auront pas pris les mesures nécessaires pour venir à bout de ce problème.» Et qu’en est-il du Luxembourg? Les deux frères s’accordent à dire que «le ministère des Affaires étrangères au Luxembourg ouvre les portes, nous soutient et met tout en œuvre pour utiliser la voie de la diplomatie». Gageons que certaines oreilles s’ouvriront d’ici là.
https://www.facebook.com/zeroimpunity/
Sarah Melis
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