« Une finale ne se joue pas pas, elle se gagne »: cet adage du football ramène la France à une réalité cruelle après la défaite contre le Portugal dimanche (1-0 a.p.) en conclusion de l’Euro-2016, qui l’a privée d’un 4e titre après les Euros de 1984 et 2000 et le Mondial de 1998.
Le Président de la République François Hollande recevra quand même les Bleus lundi à déjeuner à partir de 13h00.
Certains joueurs auront sans doute la gorge serrée. « On va passer des vacances de merde », a lancé sèchement André-Pierre Gignac. L’ancien joueur de Marseille, exilé au Mexique aux Tigres de Monterrey, a eu une occasion en or, mais sa balle a trouvé un poteau sortant dans les arrêts de jeu du temps réglementaire. Et Gignac de remuer le couteau dans la plaie: « Ils nous ont attendus, ils nous ont imposés un faux rythme et ils nous ont tués dans cette prolongation. C’est terrible, c’est un cauchemar, vraiment, c’est dur ».
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Meurtrie par les attentats de 2015, plombée par la crise économique et un climat social toujours lourd, la France souhaitait ardemment vivre une parenthèse enchantée grâce à une victoire qui n’est finalement pas venue. Mais les Bleus n’ont pas à rougir. Les troupes de Didier Deschamps ont été au delà de l’objectif assigné avant le tournoi par la fédération française de football, les demi-finales. Ils ont peut-être joué à ce stade de la compétition leur vraie finale en battant les Allemands champions du monde (2-0).
Les joueurs de la génération Paul Pogba ont rempli une autre mission cruciale en réconciliant une nation avec sa sélection. Ce n’était pas gagné si on repense à 2010 et cette grève indigne de l’entraînement en pleine Coupe du monde en Afrique du Sud. La réhabilitation a pris du temps. Il y a eu un Euro-2012 en demi-teinte (quarts de finale). Puis l’ère Didier Deschamps: quarts de finale du Mondial-2014, finale de l’Euro-2016.
« L’engouement des Français »
Deschamps a d’ailleurs eu du recul dans son analyse, malgré son dégoût de la défaite: « Il n’y a pas de mots pour diminuer cette déception, elle est énorme mais il ne faut pas oublier le parcours et le soutien et l’engouement des Français. C’est dur aussi pour nos supporteurs, on aurait aimé leur offrir ce titre. »
Le peuple bleu s’est entiché de joueurs attachants. Même s’ils leur manque encore ce petit quelque chose pour être l’égal des Michel Platini, icône de l’Euro-1984, et Zinédine Zidane, idole du Mondial-1998 et de l’Euro-2000. Ce n’est peut-être que partie remise: « Platoche » avait 29 ans en 1984. Antoine Griezmann, meilleur buteur du tournoi avec 6 buts, n’en a que 25. Il apprend de ses échecs.
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Le 28 mai, il était en finale de la Ligue des champions sous le maillot de l’Atletico Madrid. Et il l’a perdue contre le Real Madrid d’un certain Cristiano Ronaldo. Dimanche, il perd encore une finale face à ce même CR7, qui était pourtant sorti sur une civière à la 25e minute, touché au genou gauche. « Perdre deux finales ? C’est vrai que c’est chiant, mais il y a des choses pires dans la vie, je reviendrai plus fort en club et en sélection, et je donnerai tout pour enlever des titres », a dit le nouveau chouchou des Français.
« Ronaldo, un grand soutien »
A-t-il trop pensé à la perspective du Ballon d’Or en cas de victoire ? « Si ça doit venir ça viendra, moi je voulais surtout remporter l’Euro. Et puis Cristiano a gagné les deux grandes compétitions (Ligue des champions et Euro, ndlr), donc je pense que ça y est, c’est fait pour le Ballon d’or ». Car elle est là, la belle histoire de ce premier Euro à 24 équipes. Sans le nouveau système de qualification, le Portugal, 3e de sa poule, ne serait jamais passé au stade supérieur.
En finale, CR7 a donc quitté prématurément le terrain. Mais, ô surprise, il est revenu sur le banc, genou bandé, encourageant et guidant ses partenaires comme un coach-bis au côté de son sélectionneur Fernando Santos. Ces deux hommes sont les architectes du premier titre majeur de la Selecçao, toujours placée mais jamais gagnante jusqu’ici. « Le fait qu’il soit sur le banc et dans le vestiaire, cela a été un grand soutien pour motiver nos joueurs et je veux le remercier », a salué Santos. « Cristiano m’a dit que j’allais marquer le but de la victoire », a même confié Eder, buteur victorieux.
Le dernier mot de la nuit magique des Portugais revient donc à CR7: « C’est un trophée pour tous les Portugais, tous les immigrés, tous les gens qui ont cru en nous ». La fête au Portugal ce lundi, avec le retour des héros à la mi-journée à Lisbonne, s’annonce hors normes.
Le Quotidien/AFP