«Le Brexit aura probablement une répercussion sur le besoin en classes internationales», dit le ministre de l’Éducation nationale en évoquant les défis qui l’attendent. Claude Meisch se réjouit, par ailleurs, d’une «sérénité» retrouvée au sein des écoles.
Vous annonciez, en septembre dernier, que la rentrée scolaire 2015/2016 se ferait « en toute tranquillité ». Cela a-t-il été effectivement le cas et comment avez-vous vécu l’année scolaire écoulée ?
Claude Meisch : Après tous les conflits que nous avons eus avec les syndicats au cours de l’année dernière, nous sommes parvenus à différents accords au sujet de réformes importantes. J’estime que nous avons retrouvé une sérénité au sein des écoles, notamment en ce qui concerne les relations entre le ministère et les enseignants.
Votre tournée des lycées y est-elle pour quelque chose (NDLR : le ministre a déjà visité 25 des quelque 40 lycées du pays dans une opération visant pour lui à être au plus proche du terrain) ?
Je constate une certaine confiance des acteurs du terrain vis-à-vis des politiques du ministère. Ce dialogue est primordial et le seul petit point à déplorer est que les représentants de parents d’élèves ont été moins présents que d’autres acteurs, au cours de cette première partie de tournée.
Cela dit, une tranquillité totale ne pourra jamais exister dans l’absolu, les lycées étant en perpétuel mouvement et en cours de réformes internes à divers niveaux. Il faut bien se dire qu’on ne trouvera jamais un modèle unique « d’école parfaite », de par l’hétérogénéité des élèves du pays, notamment.
Mais constatez-vous une convergence de vues accrue ?
Tout à fait. De nombreux projets innovants se développent aux niveaux locaux, selon l’ambition du ministère de conférer davantage d’autonomie à tous les établissements scolaires du pays et donc en réfutant, dans ce sens, une approche uniforme qui serait de type « nationale », selon le maître mot de la « diversification des approches pédagogiques ».
Dans le cadre de ce début de tournée, vous avez dégagé cinq défis futurs à relever, dont celui d’adapter les écoles aux évolutions technologiques…
Le gouvernement est conscient qu’il faut investir dans le numérique et encourager les jeunes à faire des études dans ces domaines, car nous sommes actuellement confrontés à un manque de collaborateurs scientifiques dans les filières porteuses. À l’image de celles des nouvelles technologies de l’information et de la communication. En effet, nous sommes encore obligés de recruter à l’étranger.
Outre la question primordiale de l’orientation des jeunes, s’agira-t-il, également, à l’avenir, d’utiliser le numérique pour optimiser l’apprentissage ?
Effectivement. Dans ce cadre, un programme a été mis en place pour développer l’attractivité et l’apprentissage des mathématiques dans le fondamental, car cette matière n’est pas forcément la plus « sexy ». Dans cette optique, il y a un consensus, au niveau du gouvernement, pour que les rallonges budgétaires suivent cette volonté.
Il y a aussi la volonté de fournir une tablette numérique à chaque élève…
L’objectif est que toutes les classes disposent de tablettes pour chacun de leurs élèves, afin que tous les cours soient dispensés sur tablette. C’est encore à l’état de projet-pilote, mais cela a déjà été testé dans certaines classes, dites « iPad ». Nous sommes également en train de créer une section « purement informatique », dans le secondaire classique et sommes en discussion pour nous diriger vers un « lycée informatique », dans lequel les tablettes et les CV numériques seront légion. Toutes les gammes de formations en informatique, du DAP (diplôme d’aptitude professionnelle) à la 1re, sont également à l’étude.
Combien de fonctionnaires ont été ou seront recrutés en 2016 ?
Nous avons, par le passé, trop eu recours à des chargés de cours. Évolution démographique oblige, le ministère a recruté, et recrutera encore, jusqu’à la fin de l’année, 400 nouveaux fonctionnaires. Il s’agit d’un nombre conséquent si on le compare aux 750 recrutements dans la fonction publique, pour 2016, tous ministères confondus. Il y a aussi un besoin d’un nouveau type d’enseignants, avec notamment la création de filières internationales dans les lycées publics; je pense, entre autres, à l’école internationale de Differdange (EIDD), les classes anglophones du lycée Michel-Lucius. Il y a un réel besoin de recruter des professeurs ayant d’autres capacités langagières, dont des anglophones.
Dans ce contexte, quelles seront les conséquences du Brexit sur l’Éducation nationale au Luxembourg ?
Je viens juste de sortir d’une réunion à ce sujet (NDLR : interview réalisée vendredi). L’évolution et le niveau de l’offre en classes internationales y ont été discutés. Le Brexit aura probablement une répercussion sur le besoin en classes internationales. Mais nous sommes préparés. Après les réfugiés, maintenant le Brexit : nos écoles sont prêtes! Nous pouvons, si besoin, créer de nouvelles classes.
Par ailleurs, nous avons constaté un afflux de demandes depuis plusieurs mois de Britanniques déjà installés au pays, voire d’entreprises britanniques prévoyant de se délocaliser au Luxembourg : la scolarisation des enfants y était à chaque fois évoquée. Brexit à part, il y a de plus en plus d’entreprises étrangères qui s’installent au Luxembourg et qui ont besoin de cette diversification de l’offre. Nous avons donc pris une décision, ce matin (lire vendredi), concernant cette tendance croissante.
Entretien réalisé par Claude Damiani
Retrouvez l’intégralité de l’interview dans Le Quotidien papier de ce lundi