Le parti conservateur d’Angela Merkel a enregistré dimanche le pire résultat de son histoire pour des élections régionales à Berlin, dans un climat de mécontentement croissant sur l’immigration dont continue de profiter la droite populiste.
L’Union chrétienne-démocrate (CDU) de la chancelière allemande n’a recueilli que 18% des suffrages, selon les sondages réalisés à la sortie des urnes par les chaînes de télévision publique, en recul de plus de 5 points par rapport au dernier scrutin de 2011, tandis que le mouvement anti-migrants et anti-islam Alternative pour l’Allemagne (AfD) fait son entrée dans le parlement local de la capitale allemande avec entre 11,5 et 12,5% des voix.
Jamais dans l’histoire de Berlin, celle de Berlin-Ouest après la Deuxième guerre mondiale, puis celle de la ville réunifiée après 1990, la CDU n’avait connu pareille débâcle.
Il s’agit du deuxième revers électoral en deux semaines lors d’un scrutin régional pour la CDU. Elle avait été devancée par l’AfD début septembre dans le nord-est du pays, et ce à un an des prochaines élections législatives.
Le piètre score de la CDU à Berlin va très probablement renvoyer le parti sur les bancs de l’opposition dans la métropole de 3,5 millions d’habitants, alors qu’il faisait jusqu’ici partie d’un gouvernement de coalition avec les sociaux-démocrates.
L’AfD a capitalisé à nouveau sur les inquiétudes que suscitent l’arrivée de centaines de milliers de réfugiés dans le pays depuis l’été 2015, avec un chiffre record de près d’un million l’an dernier.
Il capte à la fois une partie de l’électorat des partis traditionnels, au premier rang desquels la CDU, qui ne se retrouve plus dans la politique d’ouverture d’Angela Merkel, ainsi qu’un vote protestataire resté auparavant abstentionniste.
Le parti social-démocrate (SPD) essuie lui aussi à Berlin des pertes, mais plus limitées, et il arrive en tête avec environ 23% des voix, selon les chaînes de télévision.
Cela devrait permettre au maire actuel, Michael Müller, membre de ce parti, d’être reconduit dans ses fonctions.
Il a indiqué lors de la campagne vouloir former une coalition de gauche avec les écologistes, crédités de 16,5% des voix, et éventuellement aussi la gauche radicale de Die Linke, autre parti protestatire en Allemagne issu de l’ancien parti communiste de RDA, qui progresse nettement, de quatre points environ par rapport à 2011, à entre 15,5% et 16,5%.
Même s’il s’agit d’un scrutin local, l’irruption de la droite populiste dans le parlement régional berlinois, ainsi que dans les conseils municipaux de certaines mairies d’arrondissement, a valeur de symbole : métropole cosmopolite, branchée et ouverte sur le monde, la capitale allemande au statut d’Etat-région se faisait fort jusqu’ici de résister aux tendances populistes.
Le maire social-démocrate avait cherché à dramatiser les enjeux durant la campagne. Si l’AfD dépasse 10% des suffrages, « cela sera interprété dans le monde entier comme le signe d’une renaissance de l’extrême droite et des nazis en Allemagne », avait-t-il lancé.
Son appel au vote barrage n’aura été que partiellement entendu. L’AfD termine un peu en-dessous des 14% que lui prédisaient les tous derniers sondages.
Même si la CDU est depuis 15 ans traditionnellement faible à Berlin, son nouveau recul vient compliquer un peu plus la tâche de la chancelière, critiquée dans sa propre famille politique.
L’allié bavarois de la CDU, la CSU, réclame une politique beaucoup plus restrictive en matière d’immigration avec notamment un plafonnement du nombre de réfugiés admis annuellement dans le pays. Il se refuse pour l’heure à dire s’il soutiendra Mme Merkel dans la bataille pour chancellerie dans un an.
Grâce à son succès de dimanche, L’AfD, jeune formation qui en trois années d’existence est passée d’un programme anti-euro à un discours anti-migrants, va entrer dans un dixième parlement régional, sur les seize que compte le pays.
Le parti confirme qu’il est train de s’ancrer dans l’opinion, y compris dans les grandes métropoles, et plus seulement dans les zones déshéritées de l’ex-RDA, où il a ses fiefs.
Son score enregistré à Berlin est de ce point de vue similaire à celui dont le crédite au niveau national un sondage publié ce week-end : 14%. Sauf retournement, l’AfD est bien partie pour faire son entrée dans un an à chambre des députés, ce qui serait une première pour un parti de droite populiste dans l’histoire d’après-guerre de l’Allemagne.
Le Quotidien / AFP