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MeluXina «nage» à la vitesse grand V


Avec sa puissance de calcul, MeluXina va se classer parmi les 50 meilleurs ordinateurs à haute performance au monde. (photos Julien Garroy)

La légendaire sirène Melusina est la marraine du premier superordinateur luxembourgeois, capable de réaliser 10 millions de milliards d’opérations de calcul par seconde. L’inauguration a eu lieu lundi.

À la base, il s’agit d’une grande chambre tout en blanc. Au milieu se trouvent des armoires aux couleurs du Luxembourg. «Cela rappelle les tout premiers ordinateurs qui dans les années 70 remplissaient aussi des chambres de ce type», avance le ministre de l’Économie, Franz Fayot. À l’époque, l’ordinateur le plus performant avait une capacité de calcul de 150 millions d’opérations par seconde. Le premier superordinateur luxembourgeois possède, lui, une capacité maximale de 10 pétaflops, soit l’équivalent de 10 millions de milliards d’opérations de calcul par seconde. En chiffres absolus : 10 000 000 000 000 000. «La vitesse de calcul est inimaginable», note le Premier ministre, Xavier Bettel.

Il est revenu au Grand-Duc Henri de lancer officiellement le superordinateur luxembourgeois.

Un mois après l’inauguration à Gasperich du siège de l’entreprise commune EuroHPC, le Grand-Duché est le deuxième État à lancer son supercalculateur qui va intégrer un réseau de huit machines réparties à travers l’UE. Après la Slovénie et le Luxembourg doivent suivre la Bulgarie, la République tchèque, la Finlande, l’Italie et le Portugal. À terme, l’Europe compte disposer d’un réseau capable d’effectuer plus d’un billion (1018) d’opérations par seconde et faire du Vieux Continent un leader en matière de calculs de données.

La légendaire sirène Melusina a été choisie comme marraine du superordinateur luxembourgeois. Un «X» est venu remplacer le «s» pour donner naissance à MeluXina, installé dans les locaux de LuxConnect à Bissen. La société LuxProvide est en charge de l’exploitation de la «machine extraordinaire». «L’aventure commence maintenant. MeluXina va pouvoir nager», lance Xavier Bettel. L’investissement massif dans le numérique serait «la suite logique du développement économique du pays, caractérisé par l’esprit pionnier et la volonté d’oser».

Le Grand-Duc Henri a eu l’honneur d’appuyer sur le bouton rouge afin de lancer officiellement le superordinateur. À quoi servira-t-il ? «Nous avons identifié quelque 750 entités privées et publiques parmi lesquelles 20% peuvent être considérées comme clients à haut potentiel. Les entreprises et institutions répertoriées sont actives dans l’industrie, les télécommunications, la finance, la santé, l’éducation, la construction, la logistique et le commerce. Tous ces secteurs font partie de nos priorités pour le développement économique du pays», résume le ministre Franz Fayot.

Un coût global de 30,4 millions d’euros

Parmi les premiers utilisateurs de MeluXina vont figurer le fabricant de pneus Goodyear et IEE, entreprise spécialisée dans les systèmes de sécurité automobile. La particularité de MeluXina est qu’il ne s’adresse pas uniquement aux acteurs de la recherche et du développement. «Que vous soyez une multinationale déjà habituée à travailler dans le calcul haute performance, une institution, une start-up ou une PME : le superordinateur luxembourgeois est construit pour satisfaire les besoins de tous types de clients, explique le ministre de l’Économie. Notre objectif est de rendre le calcul à haute performance accessible à tout le monde.»

Sous l’égide de Mario Grotz, le président du conseil d’administration de LuxProvide, un premier appel à projets a été lancé. «Nous avons réceptionné 38 candidatures pour avoir un accès prioritaire et gratuit à MeluXina», se félicite le dirigeant. Dans les jours à venir, les derniers tests seront effectués par les équipes techniques avant de rendre accessible le superordinateur aux premiers clients. D’ici fin 2022, un centre de compétences sera mis en place au niveau national afin d’accompagner et faciliter l’accès aux opportunités du calcul à haute performance.

Avec sa puissance de calcul, MeluXina va se classer parmi les 50 meilleurs ordinateurs à haute performance au monde. En outre, il va se retrouver parmi les meilleurs systèmes en termes d’efficacité énergétique. «La digitalisation et la transition écologique figurent parmi les deux grandes priorités de relance post-Covid. Elles sont toutes les deux réunies sur ce site. L’économie et l’écologie ne sont pas des ennemies», souligne le Premier ministre.

MeluXina a un coût global de 30,4 millions d’euros. La Commission européenne prend en charge 35% de la facture.

David Marques

Les atouts du HPC

Le calcul haute performance (HPC) permet d’effectuer des calculs complexes à grande vitesse dans des domaines tels que la modélisation et la simulation, l’analyse de grandes quantités de données et l’intelligence artificielle. Les données sont rapidement interprétées, évaluées et projetées visuellement afin de montrer des modèles et de guider les chercheurs et les ingénieurs vers de meilleurs produits ou processus. Les avantages en sont nombreux : conception plus précise de pièces complexes, réduction des délais de mise sur le marché de produits et réduction du coût des matériaux.

Le HPC joue aussi un rôle clé dans la médecine pour découvrir de nouveaux médicaments ou développer des thérapies individuelles pour des patients atteints de cancer, de maladies cardiovasculaires et maladies génétiques rares.

Google à Bissen : les études se poursuivent

MeluXina ne devrait pas rester le seul centre numérique majeur sur les hauteurs de Bissen. Le gouvernement est en effet décidé à concrétiser l’arrivée d’un centre de données de Google au Luxembourg, à proximité du campus d’innovation qui héberge donc le superordinateur luxembourgeois.

Annoncé en 2017, le projet du géant américain peine toutefois toujours autant à se concrétiser. Lundi, le ministre de l’Économie, Franz Fayot, n’a pas pu faire d’annonce majeure. «Les études sur l’impact environnemental se poursuivent», a-t-il fait remarquer, sans pouvoir livrer de plus amples détails. Il s’est toutefois dit «content» que le conseil communal de Bissen ait validé en octobre dernier le Plan d’aménagement particulier. La procédure d’autorisation, ayant déjà causé de nombreux remous à Bissen, n’est cependant pas encore au bout. À côté de l’étude d’impact sur l’environnement, Google devra passer son évaluation «commodo/incommodo» pour obtenir une autorisation d’exploitation. Les ministères de l’Intérieur et de l’Environnement doivent accorder leur feu vert. Le tout dernier mot appartiendra au conseil communal. Il reste à savoir si l’autorisation de bâtir pourra encore être signée courant 2021.

En tout cas, le ministre Fayot a tenu à louer Bissen comme «commune modèle qui permet de placer le Luxembourg sur la carte de la technologie et de l’innovation, parfois contre l’opinion publique, mais sans jamais lâcher prise».

Le superordinateur de l’Uni.lu lutte contre le Covid

MeluXina n’est pas vraiment le «premier superordinateur luxembourgeois». L’université du Luxembourg dispose en effet depuis juin 2017 d’un premier supercalculateur du type High Performance Computing (HPC). Baptisé «iris», cette première machine a été rejointe courant 2020 par «aion». Les deux entités disposent d’une puissance de calcul de quelque 2,8 pétaflops, contre 10 pétaflops de MeluXina. Le superordinateur de l’université, installé à Belval, permet à plus de 500 chercheurs la possibilité de faire avancer leurs travaux de recherche en physique, cryptologie, en validation de logiciels, en analyse des réseaux de communication, en sciences des matériaux, pour les simulations en recherche économique ou encore la recherche biomédicale sur les maladies neurodégénératives. Plusieurs dizaines de millions d’euros ont été investis depuis 2017 dans ce réseau, qui a également permis ces derniers mois de lutter contre le coronavirus. «La grande puissance de calcul et les capacités de stockage du supercalculateur de l’université ont été utilisées pour activer et accélérer la recherche Covid-19 dans les domaines des sciences biomédicales et de la vie, des TIC et des sciences des matériaux», précise l’université du Luxembourg. Il y est ajouté que «le temps de résolution accéléré (du HPC) est un critère essentiel pour une lutte efficace contre la propagation de la pandémie». Plus de 1 030 tâches de calcul ont été réalisées depuis mars 2020.

 

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