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Frank Engel, dénoncé par la fraction CSV : «On s’acharne sur moi et on détruit le parti»


«Il était convenu que si ma démarche ne devait pas aboutir, je rembourserais l’argent perçu», explique-t-il. Les députés ne lui ont pas laissé le temps de régler cette affaire en interne. (photo Alain Rischard)

Frank Engel, le président du CSV, a été dénoncé au parquet par la fraction CSV. C’est épique, mais c’est aussi catastrophique pour le parti. Le président s’accroche encore.

Le désamour entre la fraction et le président du plus grand parti du pays ne cesse de s’amplifier. Il a atteint son paroxysme mardi quand la première a dénoncé le second au parquet, soupçonnant des faits d’emploi fictif, de faux et d’usage de faux. Le président Frank Engel a été rémunéré par le Cercle des amis du CSV (CSV Frëndeskrees) de juin à décembre dernier pour un montant total de 40 000 euros, selon reporter.lu, pour une tâche qu’il n’a finalement pas réussi à accomplir, celle, entre autres, de ramener des contributeurs financiers auprès de ce cercle qu’il voulait moderniser et transformer en fondation, comme il l’explique au Quotidien.

La réforme du financement des partis ne lui a pas permis d’abolir le cercle et de concrétiser son souhait, tandis que les contributeurs devenaient une espèce rare. Bref, il a échoué dans cette mission et d’autres dans le domaine de l’immobilier, raison d’être de ce cercle propriétaire à Luxembourg des locaux du CSV rue de l’Eau en sa qualité de personnalité juridique.

«Il était convenu que si ma démarche ne devait pas aboutir, je rembourserais l’argent perçu», explique-t-il. Les députés ne lui ont pas laissé le temps de régler cette affaire en interne. Dès mardi, ils dénonçaient les faits au parquet, Martine Hansen affirmant sur les ondes de RTL qu’elle n’était pas au courant de ce contrat passé entre Frank Engel et le Cercle des amis du CSV, dont elle est pourtant membre, comme d’autres de ses pairs. La cheffe de la fraction veut jouer la «transparence» et ne rien «balayer sous le tapis». Elle accuse le président d’avoir mis le parti dans une situation impossible. Ils étaient pourtant quelques-uns à lui avoir déconseillé de prendre la direction de la cité judiciaire, mais visiblement la fraction semblait déterminée.

Et maintenant ? «Voyons comment les choses évoluent», déclare Frank Engel. Le coup est rude pour le président, traîné devant la justice par les députés de son propre parti pour lequel il était prêt à rempiler en avril prochain. Le congrès qui doit avoir lieu dans un peu plus d’un mois doit renouveler ses instances dirigeantes et Frank Engel est le seul pour l’instant à avoir fait connaître sa candidature à sa propre succession. Le dernier «coup bas» des députés chrétiens-sociaux ne le fera pas changer d’avis. La fraction veut la tête de Frank Engel, véritable électron libre du parti élu il y a deux ans à la tête du CSV au nez et à la barbe de Serge Wilmes qui partait favori.

J’ai confiance en la justice

«Je ne compte pas démissionner. Je n’ai rien à me reprocher et l’organe habilité à conclure ce contrat l’a fait», explique Frank Engel. Certes, il reconnaît qu’il aurait pu en parler autour de lui avec les représentants du parti, et en ce sens il a péché. «C’est une erreur d’appréciation», juge-t-il aujourd’hui.

Mais pour le reste, «ne pas rendre public un contrat de droit privé n’est pas un délit», souligne-t-il. Frank Engel bénéficiait d’un contrat à durée déterminée pour mener à bien sa mission et il ne voit pas en quoi l’avis de 25 députés qui ne sont pas concernés avait de l’importance.

«Après m’avoir empêché de faire quoi que ce soit pendant deux ans, on s’acharne sur moi et on détruit le parti au passage», observe Frank Engel avec lassitude, mais il se ressaisit vite pour remonter sur le ring. Il donnera une conférence de presse vendredi matin pour s’expliquer plus longuement sur cette affaire qui compromet fortement ses chances de conserver la présidence. S’y accroche-t-il encore vraiment dans ce climat délétère ? «C’est une sale affaire, mais j’ai pleinement confiance en la justice luxembourgeoise», répond-il.

Il est plus qu’évident qu’il constitue un problème pour certains au sein du parti. Mais alors qu’aucun autre candidat ne s’est encore officiellement manifesté, même si le nom de Gilles Roth se murmure en coulisses, la fraction tire à boulets rouges sur le seul volontaire à diriger un parti qui accumule les déconvenues.

Geneviève Montaigu

En ruine

Successivement mardi dans la journée, RTL radio et reporter.lu révélaient la démarche entreprise par la fraction auprès du parquet et l’existence du contrat qui liait Frank Engel avec le CSV Frëndeskrees, le Cercle des amis du Parti chrétien-social. Ce dernier a fait toute la publicité nécessaire autour de cette affaire dans le seul but de nuire à Frank Engel.

Tous les observateurs, y compris des sympathisants du CSV, ont assimilé cette action à un véritable suicide. Les dégâts pour le parti sont énormes, surtout après le récent épisode des vaccins aux Hôpitaux Robert-Schuman avec l’ancien ministre Jean-Louis Schiltz en vedette.

Le vieux parti s’effrite toujours un peu plus depuis la fin de l’ère Juncker et le pari de Frank Engel de vouloir le réanimer est perdu. Un ou une autre devra se sentir assez fort(e) pour recoller les morceaux. L’avenir de Frank Engel au sein du CSV est brouillé. S’il perd la présidence, il n’a plus aucune fonction politique. S’il claque la porte, il n’ira pas frapper ailleurs. Cette bête politique pourrait bien rebondir et se mettre en marche pour fonder un nouveau parti.

Avec Frank Engel, il faut s’attendre à tout. Mais pas forcément à le voir tendre l’autre joue.

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