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[Le portrait] Eric Breckler, soutien de famille


Eric Breckler, directeur sportif du promu mondercangeois, gère son groupe à contre-courant du modèle actuel. Des convictions qui lui viennent de son expérience personnelle.

Quand Mondercange est monté en BGL Ligue, au printemps dernier, son directeur sportif, Eric Breckler, a reçu une visite à laquelle il ne s’attendait pas forcément mais qui lui a paru, après coup, d’une logique implacable : celle des femmes des joueurs. Après que des garçons comme Paul Bossi, Kevin Ruppert, Billy Bernard, Alessandro Alunni… ont rejoint le FCM à l’époque de la Promotion d’honneur pour n’avoir à faire que trois à quatre séances par semaine, ces dames ont pris les devants : «Elles avaient peur qu’on monte à cinq séances, ce qu’elles ne voulaient pas du tout! Et oui, ce sont les femmes qui gèrent et elles ont raison : il faut savoir voir plus loin que le foot.»

Eric Breckler en sait quelque chose. Le football lui a coûté un mariage. À 31 ans, après plusieurs saisons à éviter consciencieusement la DN (il avait un temps préféré filer au Progrès, en PH, plutôt que de monter avec Dudelange), il avait fini par répondre aux sirènes du Mertzig de la folle génération Zaritski, Séchet, Rémy, Cicchirillo… La France venait d’être championne du monde et le grand argentier du club nordiste d’alors, Camille Studer, fondateur de la Provençale, l’avait appâté avec un stage de présaison à Clairefontaine, l’antre des Bleus. «Comment résister à ça?» Mais quand l’ordinaire a repris ses droits, il est vite devenu évident que les trajets à rallonge tout au long de la semaine auraient raison de son couple. «Cette histoire m’avait coûté ma vie de famille. C’est sans doute pour ça qu’aujourd’hui, je la privilégie pour les joueurs. C’est important de trouver un équilibre et que les gars soient avec les leurs. Une soirée en famille, un lundi, c’est mieux qu’un décrassage. C’est important. Ces joueurs, ce sont tous un peu mes enfants et d’ailleurs, j’ai joué avec les pères de pas mal d’entre eux.» La famille par-dessus tout, donc. Dans sa gestion de club, mais pas que…

Ce sont les femmes qui gèrent et elles ont raison

Démonstration. L’ancien ailier tout en vivacité est français… alors que son père est né luxembourgeois (et toute sa descendance avec lui) et sa mère polonaise. En effet, papa a, un jour, dû traverser la frontière pour trouver du travail chez Arcelor en tant qu’ajusteur… et changer de nationalité. Ainsi, les souvenirs du petit Eric sont à Hagondange, près du futur centre thermal d’Amnéville, où il prenait des bains d’eau ferrugineuse en douce avant de rentrer pour ruiner la baignoire familiale, qui en ressortait rouge et faisait brailler sa mère. C’est là aussi qu’il a fait beaucoup de course à pied  et commencé le foot à Talange, où il évolue en D4 à seulement 17 ans en compagnie du futur président d’Amnéville, Laurent Fanzel, «avec lequel on s’engueulait tout le temps», rigole-t-il. Et pourtant, aujourd’hui, il a retraversé la frontière après avoir été recruté par Dudelange, un jour qu’il venait faire le plein d’essence durant son service militaire. Plus de 35 ans après, il a entamé les démarches pour devenir citoyen grand-ducal : «Je le fais en mémoire de mon père, qui n’est plus là. C’est un retour aux sources, un retour à la normale.»

Je le fais en mémoire de mon père, qui n’est plus là

Eric Breckler n’est pas qu’un homme qui place la famille au-dessus de beaucoup de choses. C’est aussi un homme qui veut se donner les moyens de pouvoir le faire dès lors qu’il essaye, en plus, de gérer un club. Et dans son jeu, il a deux atouts majeurs. Le premier étant un peu d’argent. Lui et son ex-femme ont en effet possédé jusqu’à dix-huit crèches Ribambelle (et employé 110 personnes dans tout le pays), revendues il y a une paire d’années à un groupe français. Aujourd’hui reconverti dans la promotion immobilière, Breckler est devenu un sponsor discret mais important à qui l’on demande souvent s’il n’a pas envie de faire président de club mais qui répond tout le temps que ça ne l’intéressera jamais autant que la vie d’un vestiaire. Ses soucis sont ailleurs : «La différence entre un budget de PH et un budget DN, c’est du simple au double. Donc il faut y mettre les moyens et ne pas se tromper.» Donc mettre les moyens pas bêtement.

Ce qui nous conduit à son deuxième atout : le relationnel. Cet été, on a longtemps cru rêver quand un promu de PH a recruté comme entraîneur des gardiens l’ancien joueur de l’ASNL, Nice et Marseille, Damien Grégorini. Une prise de guerre assez hallucinante qu’on pensait réservée aux clubs du top 5. «J’ai dû faire appel à beaucoup d’intermédiaires pour arriver jusqu’à lui et lui présenter le projet. Mais c’est pareil pour la venue de M’Barki, que beaucoup d’autres clubs voulaient. Et leur notoriété à tous deux permet d’attirer des joueurs.» Combien faut-il d’amis ou d’amis d’amis pour accéder à ce genre d’opportunités? À la limite, c’est un détail : les joueurs viennent pour Breckler, ils restent pour la famille.

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